Depuis de nombreuses années, l’œuvre de Pierre Gaste s’est construite et se regarde selon un critère que chacun connaît d’intuition, dont on parle peu, et que l’on trouve rarement aujourd’hui présenté dans sa pureté : la beauté telle qu’elle peut surgir dans le travail spécifique et unique d’un peintre, telle qu’elle prend forme et se fixe sur une toile par le travail des lumières, des couleurs, des épaisseurs, des textures, par le choix d’un motif - souvent un simple objet, qu’est-ce qu’une ailette quand la nature en prodigue à foison ? - auquel le peintre, par ses retours et ses variations d’approche, dans sa quête toujours insatisfaite de rendre mieux visible, finit par donner une formidable aura.
Les grands formats comme les grands calques de ce peintre qui a eu le courage, quarante ans durant de ne jamais délaisser la peinture et son apport irremplaçable de nouveauté complète du « donné à voir » quand une œuvre est réussie et qu’il est le premier à l’éprouver, toutes ces peintures sont œuvres de silence. Elles le sont parce qu’elles ne jouent pas à donner la réplique plastique ou picturale aux problèmes d’actualité de notre société. Elles appellent le silence pour être regardées parce qu’elles résultent d’un travail sur la sensibilité aux choses, à leur vibration, à leur vie même en dehors du langage des paroles et des gestes…
Henri-Alexis Baatsch